À N’Djamena, les lieux de consommation de chicha se multiplient à une vitesse inquiétante , attirant principalement des jeunes et, de plus en plus, des femmes. Ce phénomène, initialement marginal, est aujourd’hui devenu une tendance sociale qui soulève des préoccupations majeures en matière de santé publique, de respect des traditions et des valeurs sociales tchadiennes
Autrefois perçue comme une activité exclusivement masculine, la consommation de chicha, ou narguilé, a progressivement séduit un public jeune et diversifié. Les jeunes, fascinés par les influences culturelles venues de l’étranger, voient en ces lieux des espaces de détente et de socialisation. Les femmes, quant à elles, y trouvent un moyen de briser certains tabous sociaux et d’affirmer leur présence dans des espaces jusque-là dominés par les hommes.
Ces lieux, souvent installés dans des quartiers populaires ou près des établissements scolaires et universitaires, deviennent des points de rassemblement où les jeunes, en quête de distraction, passent de longues heures. Malheureusement, cette popularité croissante s’accompagne d’une banalisation des dangers associés à cette pratique.
Contrairement à ce que certains pensent, fumer la chicha n’est pas moins nocif que la cigarette. En réalité, une séance de chicha expose l’utilisateur à un volume de fumée bien supérieur à celui d’une cigarette. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), une session peut équivaloir à fumer jusqu’à 100 cigarettes. Les risques incluent des maladies respiratoires chroniques, des cancers et des troubles cardiovasculaires.
Pour les femmes enceintes, les dangers sont encore plus élevés, car la fumée inhalée peut nuire au développement du fœtus. De plus, la chicha est souvent associée à d’autres pratiques nuisibles, comme la consommation d’alcool ou de substances illicites, amplifiant les risques sanitaires et sociaux.
La prolifération des lieux de chicha à Ndjamena ne met pas seulement en danger la santé, mais aussi l’équilibre culturel et moral de la société. Dans une ville où les traditions et les valeurs religieuses jouent un rôle central, ces lieux sont perçus par beaucoup comme des espaces où les normes sociales sont bafouées. La présence de jeunes femmes dans ces endroits choque souvent les familles, car elle va à l’encontre des attentes traditionnelles liées à leur rôle dans la société.
Les parents, démunis face à cette nouvelle mode, expriment leur inquiétude. Pour beaucoup, la chicha symbolise une ouverture à des comportements déviants, marqués par un relâchement des mœurs et une perte de repères culturels. Cette situation aggrave les tensions générationnelles, les adultes reprochant aux jeunes leur manque de respect pour les valeurs héritées.
Face à cette montée en flèche de la consommation de chicha, des actions concrètes s’imposent. Il est urgent que les autorités locales renforcent la réglementation des lieux de chicha, notamment en contrôlant leur proximité avec les écoles et les universités. Des campagnes de sensibilisation, ciblant particulièrement les jeunes et les femmes, doivent être menées pour informer sur les dangers de cette pratique.
La prolifération des lieux de chicha à Ndjamena est bien plus qu’une simple tendance : elle reflète des bouleversements sociaux et culturels profonds. Si elle attire des jeunes et des femmes en quête de liberté et de modernité, elle met également en lumière les dangers auxquels ils s’exposent. Une réponse collective et proactive est nécessaire pour protéger la santé publique, préserver les traditions et guider les jeunes vers des choix plus responsables.