Fondatrices du LARDO, Zeneba Ousmane Elimi et Leila Mahamat Moussa, ont partagé leurs visions à travers cette interview accordée à TribuneEchos. Sans dérives ni embûches, elles répondent ouvertement et objectivement à l’ensemble des questions posées par les reporters.
Zeneba Ousmane Elimi, étudiante en Master 2 de marketing international, je nourris une grande passion pour la géopolitique, la géostratégie, et la lecture, avec un intérêt particulier pour l’Afrique et surtout pour le Tchad, mon pays d’origine. Bien que je me considère comme une citoyenne du monde, ouverte sur les questions globales, je reste profondément attachée à mes racines tchadiennes.
Leila Mahamat Moussa, en deuxième année d’études de santé, je suis passionnée par
l’histoire, l’art, la politique, et la géopolitique, ainsi que par la découverte des différentes cultures. Zeneba et moi partageons une même vision d’une citoyenneté mondiale.
TribuneEchos : Qu’est-ce qui vous a poussées à fonder Lardoo ?
L’envie de créer LARDOO est née avant tout de notre amour profond pour le Tchad,
notre pays. Nous sommes également très conscientes des difficultés quotidiennes
auxquelles les Tchadiens font face, des difficultés amplifiées par des inégalités sociales marquées. Le Tchad est l’un des pays les plus pauvres au monde, et la population a un besoin urgent de solidarité. Notre engagement à travers LARDOO est motivé par ce désir de contribuer à réduire ces inégalités et de soutenir concrètement ceux qui en ont le plus besoin.
TribuneEchos : Qu’est-ce qui vous a motivées à choisir l’éducation comme l’une des priorités de Lardoo ?
Ce qui nous a poussés à faire de l’éducation une priorité de LARDOO, c’est l’accès extrêmement limité à l’éducation au Tchad. Le taux d’alphabétisation y est très faible, et les ressources pédagogiques manquent cruellement. Les chiffres sont parlants: selon la Banque mondiale, le taux d’alphabétisation au Tchad n’est que de 31,8 %, avec seulement 14 % de femmes alphabétisées, contre 48 % pour les hommes. Face à cette situation, il nous est apparu essentiel de concentrer nos efforts sur l’éducation, car nous croyons fermement qu’elle est la clé du développement et de l’émancipation des individus et des communautés.
TribuneEchos : Pourquoi avez-vous jugé essentiel de vous attaquer à la problématique de l’accès à l’eau potable au Tchad ?
Nous avons jugé essentiel de nous attaquer à la question de l’accès à l’eau potable au Tchad pour plusieurs raisons. D’abord, l’accès à l’eau potable est un droit fondamental, mais il reste malheureusement inaccessible pour une grande partie de la population tchadienne. L’eau potable est cruciale pour prévenir les maladies hydriques, qui sont une cause majeure de mortalité, surtout chez les enfants de moins de cinq ans. Actuellement, environ 43 % de la population tchadienne n’a pas accès à l’eau potable, soit 7,3 millions de personnes concernées. En améliorant l’accès à l’eau potable, nous visons à renforcer la santé et le bien-être des populations locales.
TribuneEchos : En quoi la solidarité entre les communautés est-elle cruciale pour vous, et comment cela influence-t-il vos initiatives ?
Pour nous, la solidarité entre les communautés est cruciale car elle promeut la diversité, renforce les liens et permet le partage des ressources, qu’elles soient financières, matérielles ou humaines. Dans des projets comme ceux que nous menons, qu’il s’agisse de l’accès à l’eau potable ou de l’éducation, la collaboration entre différentes communautés peut vraiment amplifier les résultats. Le partage des savoirs, des expériences et des stratégies aide à surmonter les défis communs. De plus, les initiatives basées sur la solidarité sont souvent mieux acceptées et soutenues par les populations locales. Elles incitent les communautés à prendre en main leur propre développement, ce qui conduit à une meilleure appropriation et pérennité des projets.
TribuneEchos : Pourquoi avez-vous décidé de concentrer vos efforts sur la nutrition et la santé dans les communautés que vous servez ?
Le Tchad figure parmi les pays les plus touchés par la malnutrition, surtout chez les enfants de moins de cinq ans. Chaque fois que nous revenons au pays, notamment dans les régions du Kanem et du B.E.T., nous constatons l’ampleur de la malnutrition. Qu’elle soit aiguë ou chronique, la malnutrition entraîne des retards de croissance, une vulnérabilité accrue aux maladies, et un taux de mortalité infantile très élevé. Il est donc crucial d’intervenir dans ce domaine pour améliorer les chances de survie et le développement des enfants. Une bonne nutrition est fondamentale pour le développement cognitif et physique, et les enfants malnutris rencontrent souvent plus de difficultés à l’école, ce qui perpétue le cycle de la pauvreté. En investissant dans la nutrition, nous contribuons à bâtir une génération plus saine, mieux éduquée, et prête à relever les défis de demain. La santé maternelle est également primordiale : des mères en bonne santé sont plus aptes à donner naissance à des enfants en bonne santé et à les élever dans de meilleures conditions. En nous concentrant sur ces aspects, nous contribuons à réduire les inégalités sociales et économiques, posant ainsi les bases d’un développement durable.
TribuneEchos : Quels facteurs vous poussent à envisager l’implication croissante de la communauté dans vos projets futurs ?
Impliquer la communauté est essentiel pour s’assurer que nos projets répondent vraiment aux besoins des populations et sont adaptés au contexte local. Lorsque les membres de la communauté sont engagés dès le départ, ils se sentent responsables et investis dans le succès des projets, ce qui augmente leur pérennité, même après notre retrait. Les membres de la communauté sont les mieux placés pour identifier leurs besoins et priorités. Leur implication permet de cibler plus précisément les interventions, de définir des objectifs réalistes et d’éviter les erreurs potentielles.
TribuneEchos : Comment choisissez-vous les thématiques sur lesquelles LARDOO se concentre, et quels critères influencent ces choix ?
Chez LARDOO, nous choisissons nos thématiques en fonction des besoins essentiels identifiés au sein de la société tchadienne. Nous nous concentrons sur des domaines ayant un impact direct et durable sur le bien-être de la population, tels que l’éducation, la santé, l’accès à l’eau potable, la nutrition et le développement communautaire. Ces choix sont guidés par notre volonté d’améliorer les conditions de vie et de renforcer la solidarité entre les communautés. Nous prenons également en compte notre capacité à fournir une aide efficace dans ces domaines, afin de concentrer nos efforts là où nous pouvons vraiment faire une différence.
TribuneEchos : Quelles expériences personnelles ou observations ont façonné votre vision des enjeux que vous traitez avec LARDOO ?
Avoir grandi en France nous a permis de vivre entre deux cultures, enrichissant ainsi
notre identité. Notre lien avec le Tchad est profond, ancré dans notre histoire familiale, et chaque retour dans ce pays nous confronte à une réalité marquée par des inégalités persistantes, même dans la capitale. Bien que N’Djamena évolue, les disparités restent frappantes. L’accès à une éducation de qualité, aux soins de santé et à l’eau potable demeure difficile pour beaucoup. Ces constats nous touchent profondément et renforcent notre volonté d’agir. Contrairement au confort et aux opportunités dont nous avons bénéficié, ces réalités nous interpellent et nous motivent à contribuer à un changement durable. C’est cette volonté qui a donné naissance à LARDOO, un projet dont le nom signifie « pays » en langue Gorane, symbolisant notre engagement envers le Tchad. Ce projet nous tient à cœur, car il reflète notre détermination à utiliser nos privilèges et nos ressources pour améliorer la vie de ceux qui n’ont pas eu les mêmes chances. C’est une mission commune, guidée par notre amour pour le Tchad et notre engagement à contribuer au bien-être de notre peuple.
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